Définition : création

1. La création est, du côté de Dieu, l’acte libre (comme cause efficiente, exemplaire et finale) par lequel Dieu a suscité l’univers ex nihilo sui subjecti, (c’est-à-dire « à partir de rien », sans matière préexistante). On parle de création continuée chez certains thomistes pour dire que cet acte se prolonge quant à son effet dans le temps : ce qui est créé par Dieu est conservé dans l’existence par sa toute-puissance (créatrice).

2. La création signifie l’effet de l’acte créateur divin, c’est-à-dire toutes les réalités créées (matérielles et spirituelles comme les anges ou l’âme humaine). La notion de création signifie alors deux choses différentes : a) tout étant parce que créé dépend de Dieu dans son existence, c’est un habens esse. Qui dit création dit d’abord dépendance dans l’être, ce que la raison peut de soi rationnellement prouver sans la foi ; b) par la foi, nous tenons que l’univers a commencé dans le temps (ou avec le temps). Le monde aurait pu être créé de toute éternité, (ad aeterno), il n’en serait pas moins dépendant de Dieu pour exister. Par la foi seulement et donc en raison de la Révélation, nous pouvons affirmer que le monde a commencé d’exister. De soi, la raison livrée à ses seules lumières ne peut ni l’affirmer, ni l’infirmer.

3. La création est l’œuvre de Dieu ad extra, l’acte de sa puissance et de sa bonté selon lequel il se communique librement et diversement. Ainsi la création est la procession temporelle des créatures ad extra qui prolonge (par dérivation et participation libres et hiérarchisées) les processions éternelles ad intra. C’est à la procession du Saint-Esprit que saint Thomas rattache l’agir créateur et sauveur : de même que c’est l’amour d’un bien qui rend compte de l’activité humaine extérieure, de même c’est par son amour (Esprit-Saint) que Dieu procède vers l’extérieur. C’est donc la procession du Saint-Esprit selon l’amour et qui est amour personnel, qui rend compte de l’acte et de l’impulsion de la procession temporelle de toutes les créatures : « L’amour par lequel Dieu aime sa propre bonté est la cause de la création » (CG, IV, c. 20). Cependant la création est l’œuvre commune des trois personnes, agissant par leur essence, et chaque personne y intervient selon sa propriété personnelle. Elles agissent inséparablement selon une causalité indivise efficiente ad extra, en vertu de leur commune nature, mais dans cet agir commun, chaque personne agit selon le mode distinct de sa relation à l’égard des autres personnes. Autrement dit les sujets de l’agir commun ad extra sont distincts et leur mode propre d’action est distinct, qui reflète leur propriété relative personnelle au-delà de l’appropriation. Leur mode d’agir reflète leur mode d’être selon la propriété relative. Dieu est créateur, un seul créateur, mais ils sont trois créants ou opérants, trois sujets de l’action créatrice indivise. Ils agissent ensemble selon un mode d’existence et d’action conforme à l’ordre trinitaire. Le mode d’agir distinct consiste dans le rapport personnel intratrinitaire, la relation mutuelle des personnes divines. Ainsi la création s’éclaire par la distinction et par les relations trinitaires. La pluralité des créatures est une participation à la plénitude de la vie trinitaire de Dieu. « Principe de distinction au sein de la Trinité, la relation personnelle apparaît comme la source ultime de la création et de toute pluralité dans notre monde » (G. Emery).

Voir Philippe-Marie Margelidon, Yves Floucat, Dictionnaire de philosophie et de théologie thomistes, p. 137-138.