Tout au long de son commentaire du récit des apparitions pascales, dans les évangiles de Matthieu et de Jean, saint Thomas développe, à l’école des Pères, notamment de Denys, le sens « anagogique »des textes. L’expérience pascale des saintes Femmes et des Apôtres continue d’éclairer l’Église, notamment à travers l’exégèse du Maître, et elle s’offre comme la principale source de l’intelligence chrétienne des fins dernières.
Dans son maître ouvrage sur l’exégèse médiévale, Henri de Lubac se faisait l’écho d’Yves Congar, selon qui le manque de sens eschatologique représentait le défaut le plus décisif de la théologie issue de la scolastique. « On peut ajouter, glosait le P. de Lubac, que ce défaut — qui n’est d’ailleurs ni constant, ni sans remède, — provient précisément de ce que la théologie n’a plus alors la forme d’une exégèse. » La théologie universitaire ne revêt certes pas au Moyen Âge la seule forme d’une exégèse biblique. À l’époque d’Albert, de Bonaventure ou de Thomas, la lecture de la Page sacrée demeure cependant un moment premier et essentiel du labeur théologique, de telle sorte que les questions disputées restent étroitement liées à l’interprétation du texte inspiré. Saint Thomas affirme ainsi que la théologie reçoit ses principes de l’Écriture. Elle les en extrait au prix d’une longue étude. Ce travail de découverte des principes de la théologie dans l’Écriture n’est pas une tâche accomplie une fois pour toutes, considérée comme un acquis par le théologien, qui n’aurait plus qu’à spéculer avec les instruments de la philosophie sur le donné préalablement fourni par l’exégèse. La mise en lumière des articles de foi à travers la lecture sans cesse reprise de l’Écriture est concrètement le moyen d’assurer la « subalternation » de la doctrine sacrée à la science de Dieu et des bienheureux. La lecture de l’Écriture nourrit constamment la foi de l’Église. Elle est l’âme d’une saine théologie, en particulier relativement aux fins dernières.