En août 2018, le pape François a modifié l’article 2267 du Catéchisme de l’Église catholique qui affirme désormais que le recours à la peine de mort est toujours inadmissible, car privant le coupable de la dignité dont toute personne est revêtue, même s’il s’agit d’un grand criminel. Loin de représenter une rupture par rapport au magistère antérieur, cette nouvelle rédaction apparaît davantage comme l’aboutissement d’un processus engagé il y a des années, dans la lumière des principes anthropologiques énoncés par Vatican II. Il reste que la mise en pratique de ce principe de prohibition de la peine capitale rencontre de redoutables difficultés.
L’Église n’a jamais aimé la peine de mort. Elle s’en est longtemps accommodée. Le cinquième commandement du Décalogue — « Tu ne tueras pas » — lui est trop familier pour qu’elle puisse jamais l’oublier. Voilà pourquoi, pendant les longs siècles de chrétienté, elle s’est interdit de mettre elle-même à mort un homme dont elle estimait qu’il méritait cependant cette peine : elle confiait cette tâche au pouvoir séculier avec lequel elle entretenait des liens étroits — c’est le propre des temps de chrétienté. Pierre Manent résume ainsi cette situation : « Ce qu’elle s’interdisait de faire elle-même, elle en reconnaissait la légitimité de principe quand l’auteur en était l’autorité politique légitime. » De fait, il semble bien que l’Église ait voulu confier au pouvoir temporel le soin de sanctionner le corps quand elle se réservait le sort de l’âme. Les récits de condamnés à mort convertis in articulo mortis émaillent la vie de bien des saints, jusqu’à Thérèse de l’Enfant-Jésus, et suscitent toujours l’admiration des fidèles.