Il n’est pas fréquent de lire dans la préface d’un livre : « Ce livre génial sera parmi la poignée d’ouvrages qui a marqué l’histoire médiévale et l’histoire des mentalités en général depuis un siècle. » Cela invite certainement à la lecture.Le propos de cette étude est de montrer comment est né le modèle d’équilibre à partir de la deuxième moitié du XIIIe siècle. Lorsqu’on sait à quel point le mot est d’usage quasi général de nos jours, qu’il désigne seulement une simple métaphore ou qu’il entend exprimer un authentique concept, il est en effet d’une particulière importance d’en cerner les contours.De fait, on constate aisément que de nos jours l’usage du vocabulaire de l’équilibre constitue une des principales ressources pour dire l’unité d’un être complexe à partir des relations de ses éléments constitutifs (équilibre corps-esprit), ou pour exprimer les relations entre diverses réalités (équilibre des pouvoirs dans l’État). Or cette notion n’est pas toujours utilisée avec rigueur, et même avec précision. C’est souvent le sens métaphorique qui est suggéré à partir de l’image bien connue de la balance (équilibre se dit balance en anglais). Elle dit le résultat du jeu de deux forces opposées qui s’égalisent. Il y a de nos jours à ce sujet, dans la plupart des domaines du savoir, une insuffisance conceptuelle manifeste. C’est le principal mérite de cette très savante étude de contribuer àlever le flou notionnel en montrant ce qui peut être — très implicitement — derrière cette façon de s’exprimer.