La solution de Thomas d’Aquin au problème de l’intensification des qualités souffre d’une certaine instabilité et, dans la génération suivante, a été disloquée par les différentes contraintes qu’elle tentait de concilier. Cet article explore les réponses apportées par Gilles de Rome, Godefroid de Fontaines, Pierre d’Auvergne et Thomas de Sutton. Introduite par Godefroid, mais développée par Sutton, la notion de mode va jouer un rôle très important. La solution de Sutton, particulièrement, invite à une comparaison avec la théorie des modes intrinsèques chez Duns Scot.
C’est avec les Catégories d’Aristote que naît le problème de l’intensification des qualités, mais un des lieux pour le discuter au Moyen Âge est classiquement la question de l’augmentation de la charité, à la distinction 17 du livre I d’un Commentaire des Sentences. Toutefois, les mêmes thèses s’appliquant aux qualités physiques, l’intérêt de ces discussions est loin d’être limité au cas de la charité et s’étend à la philosophie naturelle. Il s’agit de comprendre comment certaines entités telles que chaleur, dureté, ou justice, qui sont cataloguées comme qualités dans la nomenclature ontologique aristotélicienne, croissent ou décroissent en intensité. La difficulté est de définir de quel type d’augmentation il peut bien s’agir, étant donné que nous n’avons pas ici affaire à des quantités ou à des entités directement quantifiables.