Dans cette suite et fin de l’article, on analyse la deuxième période de la pensée de Johann Baptist Metz, marquée par sa Politische Theologie. Le concept fondamental de cette étape est le monde — compris dans le sens heideggérien —, qui constitue la continuité avec la première période transcendantale de Christliche Anthropozentrik. Metz élabore une théologie du monde, dont l’horizon est la théologie politique de caractère marxiste — avec la proclamation de la primauté de la praxis —, qui débouche sur la phase de la memoria passionis, avec l’élaboration d’une théologie après Auschwitz
Dans la première partie de notre travail — publié dans le fascicule précédent de la Revue thomiste —, nous avons vu comment la foi — lumen fidei — a été définie comme un mode supérieur de subjectivité, c’est-à-dire un mode plus intense de l’être en soi (eine erhöhte Weise des Beisichseins). En ce sens, Metz avance dans sa réflexion philosophique et se rend compte qu’il ne peut rester dans les catégories d’un subjectivisme transcendantal fermé s’il veut élaborer une théologie adaptée au temps et monde actuels. Pour cette raison, Metz introduit le concept d’intersubjectivité (Intersubjektivität), lié à la foi du croyant, en essayant de souligner ainsi sa dimension communautaire ou ecclésiale. Le concept d’intersubjectivité provient de l’idéalisme allemand et trouve chez Edmund Husserl un développement systématique. Toutefois, Metz adopte ce concept avec l’intention de dépasser la signification donnée par la philosophie personnaliste chrétienne. Bien que l’intersubjectivité du personnalisme soit très éloignée de l’intersubjectivité monadologique de Husserl, Metz estime que la solution personnaliste n’est pas satisfaisante, car celle-ci ne considère pas, comme un locus theologicus, la relation de l’homme avec l’homme. Pour Metz, cette relation humaine moi-toi a une signification profondément théologique, puisque le sujet spécifique de la foi est l’homme compris sur le plan intersubjectif...