Le propos de cet article est d’analyser l’usage que Thomas d’Aquin fait des différentes définitions de la vérité qu’il reçoit de ses prédécesseurs (Augustin, Anselme, Philippe le Chancellier, Aristote, Avicenne et Isaac Israeli). L’Aquinate ne fait pas que citer les définitions de ces auteurs : il lesclasse, les lit et les utilise selon son propre point de vue. Il s’efforce de faire se rejoindre la pensée chrétienne et la philosophie aristotélicienne (reçue par la tradition arabe). En ce sens, il a reçu du xiie siècle, comme un héritage tout à fait précieux, la notion de verum comme concept transcendantal.
L’objectif de cet article est d’analyser les usages que fait Thomas d’Aquin des définitions du vrai (verum) héritées de la tradition antérieure. Il est particulièrement intéressant de remarquer que l’Aquinate ne se limite pas à citer les définitions reçues mais qu’il les organise et les utilise en fonction de sa conception originale, c’est-à-dire en accord avec sa synthèse personnelle de la tradition aristotélicienne et de la tradition du haut Moyen Âge.
Nombreuses sont les occasions où saint Thomas s’emploie à préciser la notion de vérité, c’est-à-dire où il examine la ratio spécifique qui la caractérise. Il y consacre d’importants passages dans ses quatre grands exposés synthétiques : In I Sent., dist. 19, q. 5 ; De veritate, q. 1 ; Summa contra Gentiles, Lib. I, cap. 60-62 ; et Summa theologiae, Ia, q. 16. Il ne manque pas non plus de références intéressantes dans d’autres oeuvres, spécialement dans les commentaires des oeuvres d’Aristote : In Aristotelis librum de anima et In duodecim libros Metaphysicorum Aristotelis expositio.