La philosophie de la religion accorde une place de choix à l’étude de la vertu de religion. Cette attitude morale de fond, annexe à la justice, révèle au concret la vérité anthropologique fondamentale de l’ouverture de l’homme à Dieu, son créateur et sa fin dernière, que méconnaît la sécularisation. À la religion s’oppose l’idolâtrie (Sum. theol., IIa-IIae, q. 94), dont on examine à la suite de saint Thomas, les formes anciennes dans la pensée païenne et dont on signale quelques formes nouvelles dans la pensée postchrétienne.
1. Parler aujourd’hui de la religion comme d’une vertu ne rencontre pas aussitôt le sens courant du terme. La définition de la religion, ou du fait religieux, qui se ressent souvent d’une inspiration positiviste, oscille ainsi entre la sociologie et la psychologie. On dira que la religion est un ensemble de rites et de croyances assurant l’unité d’un groupe social spécifique capable de mettre ses adeptes en contact avec une puissance supérieure. Ou bien on définira la religion à partir du « sentiment religieux » considéré comme une composante de la psyché humaine dont on étudiera les diverses manifestations, y compris dans ses formes pathologiques. Ce « sentiment » est présenté comme une poussée créatrice de ses propres symboles, et en conséquence sans objet spécificateur.Ces définitions ont derrière elles des présupposés anthropologiques et épistémologiques, comme l’idée que l’objectivité scientifique a pour condition que l’observateur soit extérieur au fait religieux et neutre par rapport à la valeur de vérité qu’il implique.L’approche phénoménologique de l’histoire des religions a opéré un salutaire redressement, tout en laissant ouvertes un certain nombre de questions.Pour la philosophie de la religion, la considération de la vertu de religion met en évidence une double polarité : celle de la vérité anthropologique, et, la fondant, celle de la vérité de Dieu.La philosophie de la religion est, dans cette perspective, partie de la philosophie morale. Celle-ci s’entend en connexion avec la théologie, de qui elle apprend quelle est la véritable fin de l’homme et quelle est sa condition historique, marquée par le péché originel et par le don de la grâce.