Bulletin de christologie (VII)

Philippe-Marie Margelidon o.p.
5,00 € l'unité
2016 - Fascicule n°4
1800
647 - 677
Bulletin
Christologie


Avec la contribution du fr. Xavier Batllo, o.s.b, pour l’histoire des doctrines

Résumé

Ce septième bulletin de christologie est consacré pour les années 2014 à 2016 à trois questions : 1) la vie de Jésus reconstituée par l’histoire et l’exégèse (Puig i Tàrrech), tentative toujours recommencée et qui aboutit à des résultats à la fois solides pour certains et aléatoires pour d’autres — le projet n’est pas inutile mais n’offrira jamais de certitudes définitives ; 2) l’histoire des doctrines (entre le IVe et le XIIIe siècle) qui tente de reconstituer, à partir des textes, la réception chrétienne de l’histoire de Jésus et de son interprétation théologique et ecclésiale ; 3) la thématique, renouvelée avec et depuis Hans Urs von Balthasar, de la substitution, laquelle, diversement reçue, fait l’objet d’un approfondissement doctrinal constant depuis trente ans.

Extrait

L’unité doctrinale des christologies n’apparaît guère quand l’unité personnelle du Christ n’est pas perçue et réfléchie. La pluralité des modèles mis en œuvre reflète cette incertitude, leur disparité devient une difficulté insurmontable quand elle est justifiée par des options philosophiques — métaphysiques — irréductibles les unes et autres, et qui se réfugient derrière l’argument, érigé en principe, du pluralisme. C’est ainsi qu’au pluralisme de fait se substitue un pluralisme de droit, où toutes les options se justifient. Le résultat est que le dialogue devient quasi impossible. La mosaïque des doctrines apparaît un fait historique nécessaire et inévitable au déploiement de la réflexion christologique, et qui trouve dans ce qu’on appelle la postmodernité, sa pleine expression. La difficulté, très en consonance avec le relativisme contemporain, est de tenter d’établir des points solides de rencontre entre des pensées si diverses, dont le langage et les intentions ne sont ni homogènes ni même comparables. L’histoire des doctrines anciennes montrent que ce phénomène n’est pas nouveau, mais qu’il a pris des proportions inédites, qu’il aboutit à un seuil d’exaspération dommageable à l’approfondissement rationnel de la foi. La tentation est alors la fixation et la crispation sur un moment, souvent reconstruit, de la théologie. La louable et utile réappropriation des doctrines anciennes ne doit pas conduire à l’archéologisme, où le déni de tout progrès justifie a priori n’importe quel retour à un modèle historique du passé, antérieur au moment scolastique ou baroque, ou à l’inverse à la promotion d’une expression christologique nouvelle, d’un style nouveau, plus en harmonie avec le paradigme de la postmodernité. Bref, il devient difficile d’opérer un discernement et de poser un jugement à partir de critères communs, fondés sur des principes universels et vrais. La vérité des doctrines repose certes sur la foi, mais leur élaboration fait très rarement l’objet d’un échange, encore moins d’un débat, entre théologiens, d’où l’effet parfois déconcertant de leur juxtaposition. Cependant, la mise en perspective des doctrines, leur confrontation, avec, il est vrai, le risque possible de malentendus et de contresens, est toujours utile et instructif, fécond pour celui qui se donne la peine d’étudier et de les lire avec attention.