L’étude de la dimension trinitaire de la béatitude chez Thomas nous permet de surmonter les interprétations intellectualistes en donnant à la charité le rôle qu’elle mérite dans la constitution de la félicité humaine. La marque de l’Esprit Saint dans notre amour de Dieu explique qu’on puisse être amis de chaque personne divine. On fait des considérations de la métaphysique de l’amour et de la théologie de la charité, in via et in patria.
La Trinité, qui est notre fin ultime, à laquelle nous devons nous unir, n’est pas seulement Vérité trine à contempler mais aussi Bonté en trois personnes pleinement aimables. Dans un article précédent, nous avons fait allusion à la nécessité de dépasser les interprétations essentialistes de la vision de Dieu promise aux justes en étudiant la dimension trinitaire de la vision béatifique. Dans cet article, nous verrons comment cette dimension trinitaire permet de surmonter l’interprétation intellectualiste de la béatitude en considérant sa dimension affective.En effet, la controverse théologique autour de la vision béatifique avait, en plus de la question de la vision « par essence », un autre versant : le rôle de la volonté dans la béatitude. D’une part, saint Bonaventure, qui soutient fermement la possibilité pour l’âme d’atteindre Dieu in se dans la vision, n’affirme jamais que l’essence même de Dieu informe intelligiblement l’intellect, comme le dira saint Thomas. Il réduit la fonction de l’intellect à être medium disposens par rapport à la volonté qui a le rôle le plus formel puisque c’est en elle que se réalise la fruition de Dieu.