L’ union avec Dieu n’est pas une idée propre à la pensée chrétienne, comme le montre bien l’exergue à notre étude, tirée du Livre de la Splendeur (Sefer Ha Zohar). S’unir à l’Unique, être un dans l’Un sont les grands thèmes de la mystique philosophique, laquelle n’est pas obligée de se réclamer d’une tradition religieuse précise. Mais déjà dans cette petite citation du maître de la Cabale nous voyons qu’il ne s’agit pas de l’expérience individualiste, toute centrée sur un homme singulier qui chercherait à atteindre Celui qui rend une toute unité. La Révélation biblique est la découverte d’un Dieu qui désire et qui crée une communauté libre, créatrice, désireuse à son tour de trouver l’accomplissement véritable dans son Seigneur. Pour les chrétiens cette unité avec Dieu, que personne n’a jamais vu, se manifeste d’une manière admirable et aimable dans le Christ Jésus, Dieu fait homme, tête de l’Église et Grand Prêtre de l’Alliance nouvelle et éternelle. L’Église n’est pas d’abord une hiérarchie de pouvoir et d’efficience : elle est l’amour de Dieu qui prend forme dans l’histoire ; elle est manifestation mystérieuse du Règne des cieux, la tente que le Verbe a dressée pour habiter parmi les hommes. Les anges qui, la nuit de la Nativité, annoncent « paix sur la terre aux hommes objet de sa complaisance » (Lc 2, 14), apportent la nouvelle de la naissance du Messie et en même temps de la manifestation de l’Église, de la paix divine dans les hommes de sa complaisance. Projet de Dieu avant la création du monde, joie de Dieu après l’achèvement de cet univers, l’Église englobe et donne sens à la totalité de l’histoire. Tel est le mystère de l’Église dont Isaac de l’Étoile s’est fait le chantre.