Le concept de nature selon Georges Cottier

François-Xavier Putallaz
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2022 - Fascicule n°2
122
CXXII
Juin 2022
2
2022
265 - 278
Article

Résumé

Historien de la philosophie moderne, Directeur de la revue Nova et Vetera et Théologien de la Maison pontificale, le Cardinal Georges Cottier, o.p. (1922-2016), a laissé deux études de première importance sur la notion de nature. Il y insiste sur la polysémie du terme : donnée première de l’expérience humaine, la nature comporte une richesse que l’histoire de la philosophie a eu tendance à perdre de vue, au point qu’on en arrive à une opposition irréductible entre « nature » et « liberté », rendant inintelligible le rôle de la loi naturelle. L’enjeu consiste donc aujourd’hui à redonner à la nature toute son ampleur. On y découvrira comment la multiplicité des sens du terme rejaillit sur la diversité de la grâce qui perfectionne la nature humaine en particulier.

Extrait

Dieu étant la source de tout bien, il est clair que la distinction entre la nature et la grâce s’entend en fonction de ce qu’ont chacun de spécifique ces dons que sont le don de l’être par l’œuvre de la création et le don de la vie divine participée qui nous est communiquée par le Christ rédempteur. L’un et l’autre dons sont gratuits : l’affirmer est un pléonasme. Mais quand on parle de la gratuité de la grâce, on veut souligner que rien dans la nature créée n’exige ce second don. Faire découler celui-ci d’une postulation de celle-là, conduit logiquement à nier leur distinction.
Voilà une phrase typique du style écrit du Cardinal Cottier, sobre, précis et inspiré par une doctrine assurée permettant une rigoureuse articulation des concepts. Or la notion de nature se rencontre à plusieurs reprises dans son œuvre, et trois raisons m’ont poussé à choisir de l’évoquer.
1. Dominicain nourri à la pensée de saint Thomas, le P. Cottier enseignait à Genève et Fribourg l’histoire de la philosophie moderne. Ses cours portaient sur Kant, Marx, Stirner ou Proudhon, dont il apprenait à lire les textes avec bienveillance, ce qui lui permettait d’en dégager les intuitions majeures.
2. Sa pensée a nourri la vie intellectuelle et spirituelle de nombreux lecteurs, mais aussi d’étudiants, d’amis et de frères dominicains notamment à Toulouse.
3. Ses derniers textes laissent transparaître comme une impatience d’aller directement au cœur des choses, sans s’embarrasser de pédagogie. Ils offrent ainsi des synthèses précieuses, lesquelles peuvent contribuer à ressaisir les enjeux de notre question portant sur la nature.