Cette étude propose d’examiner les éléments constitutifs du processus pénitentiel du point de vue de la vertu de pénitence, puis d’en dégager les composantes et les actes majeurs. Il s’agit de repérer et de discerner leur articulation à l’intérieur du dynamisme pénitentiel de la vie chrétienne. La pénitence occupe une place décisive dans l’ensemble des vertus infuses, dont saint Thomas a manifesté le sens et la nécessité, non seulement dans l’ordre supérieur de la vie théologale, mais aussi dans l’ordre de la vie morale qui lui est conjoint et que la vie théologale commande.
S’il est une vertu oubliée, c’est bien celle de pénitence. Certes, elle n’est pas la seule, les théologiens et les prédicateurs ne sont pas plus diserts à propos de la chasteté ou de l’humilité. Elles font parfois l’objet de considérations générales au cours de retraites ou de prédications en fonction du temps liturgique. On ne trouvera presque rien sur la pénitence comme vertu dans les dictionnaires et encyclopédies de théologie morale les plus récents. La pénitence est traitée presque exclusivement comme sacrement, sous le nom plus avenant de réconciliation. Si on ne dit rien de la vertu de pénitence, en revanche la littérature moralisante sur la repentance politique est abondante.
Dans le passé, le P. Hyacinthe Dondaine avait montré chez saint Thomas l’articulation de la vertu et du sacrement dans le processus ecclésial de la pénitence. Ici c’est à l’examen de la vertu comme telle et de ses implications éthiques que nous procéderons. En effet, pour saint Thomas, avant d’être un sacrement, la pénitence est une vertu, même si, de fait et de droit, les deux s’enveloppent mutuellement. « Vertu sacramentelle », disait à juste titre le P. Dondaine, néanmoins la pénitence a sa forme propre en tant que vertu, que le sacrement à la fois présuppose et parachève.