La notion de fondement chez saint Augustin

Gérard Rémy
5,00 € l'unité
2006 - Fascicule n° 3 2006 - Tome CVI
413 - 432
Article
saint augustin, fondement

Résumé

La référence à la notion de fondement joue un rôle déterminant dans l’élaboration théologique d’Augustin affronté au paganisme et au donatisme. Au paganisme, qui se prévaut de cités terrestres, auréolées de mythes fondateurs, Augustin oppose la Cité céleste, fondée sur Dieu et le Christ. À la prétention du donatisme s’oppose l’indivisible Église, fondée sur la pierre qu’est le Christ, réunissant juifs et païens sous le signe de la pierre angulaire. L’appartenance à l’Église engage un travail d’édification par la conformité de la vie du fidèle avec sa foi, dont le sable figure la disjonction. Enfin, le fondement intervient dans le débat avec les miséricordieux, où il sert de critère pour les préférences accordées ou refusées au Christ.

Extrait

Que l’on parle de fondement, de fondation, d’institution, en y joignant toutes les métaphores susceptibles de donner à ces notions une forme imagée, elles désignent néanmoins l’acte inaugural d’une oeuvre qui en garantit aussi la durée au moyen de bases solides. De cette finalité découle le statut paradoxal du fondement de toute institution ; il est de sa nature de demeurer discret, à l’exemple des fondations d’un édifice qui, plongeant dans les profondeurs, se dissimulent aux regards. Sans  ondement, l’édifice s’écroulerait ; mais, en contrepartie, le motif du fondement est dans l’édifice. Si les fondations trouvent leur but dans la construction qu’elles supportent, dans le domaine humain et religieux un fondement ou une fondation sont-ils également relatifs à une autre réalité qui serait leur raison d’être ?
Une enquête sur le rôle et la place de ce complexe de notions dans l’oeuvre de saint Augustin, comme vraisemblablement de tout autre théologien, frise l’impossible, étant donnée son extension virtuelle, puisque toutes les réalités, qu’elles appartiennent au domaine de la création ou de l’Économie du salut, ne subsistent que grâce à un fondement. Aussi notre étude devra-t-elle se limiter à des cas exemplaires dont Augustin a particulièrement indiqué ou exploré les assises. Une seconde difficulté est d’ordre lexical : elle concerne la terminologie qu’il utilise pour traduire l’idée de « fondement », connexe à celle d’« origine ». De plus, si le fondement a sa finalité dans l’édification, ce terme imagé vise la croissance d’une réalité vivante. Enfin, le langage d’Augustin, nourri de l’Écriture, emprunte à celle-ci ses métaphores, notamment celle de la pierre. Ainsi se présentent les difficultés, mais surtout les ressources mises à la disposition d’une enquête sur l’irrésistible question du fondement des choses. Augustin servira de guide pour tenter de remonter à la racine de certaines réalités humaines et chrétiennes essentielles, en fonction de ses propres interrogations et préoccupations.