Une lecture des oeuvres de synthèse et des commentaires bibliques de saint Thomas permet d'approfondir le sens évangélique du miracle. Thomas définit l'Évangile comme une « alliance de l'homme avec Dieu » qui prend la forme de l’Incarnation, de la grâce sanctifiante et de la Vision. La théologie thomasienne du miracle se déploie tout entière dans ce cadre. D'une manière générale et philosophique, Thomas montre comment l'action divine « hors de l'ordre de nature » manifeste la liberté du Créateur à l'homme s'acheminant vers la Vision. Concrètement cet agir divin miraculeux culmine, d'une part, dans l'union hypostatique, et, d'autre part, dans la transformation prodigieuse en sagesse et sainteté des Apôtres, sous la conduite du Christ. Deux espèces de miracles apparaissent alors, en dépendance de ces deux sommets : les miracles qui sont intrinsèquement liés à l'Incarnation rédemptrice, tels la conception et la naissance virginales, la mort et la résurrection du Christ, sa présence eucharistique, miracles cachés qu'il faut croire (de quibus est fides), et les miracles manifestes qui font croire (ad fidei comprobationem), comme les guérisons. Ainsi l'Évangile apparaît-il traversé, de part en part, par la logique du miracle qui tient le croyant et le théologien dans une attitude souvent évoquée par Thomas : l'admiratio.
