L’eschatologie dans les commentaires thomasiens des épîtres pauliniennes

Gilbert Dahan
5,00 € l'unité
2016 - Fascicule n°1
1800
13 - 34
Article
Eschatologie

Résumé

Dans ses leçons sur les épîtres pauliniennes, saint Thomas livre un certain nombre de réflexions sur la fin des temps. Il ne s’agit pas de reconstituer à partir d’elles la doctrine que l’on peut trouver dans ses œuvres théologiques (In IV Sent., dist. 43-50 ; Sum. theol., Suppl., q. 73-92) mais d’examiner sa démarche d’exégète. L’approche philologique (critique textuelle, sémantique, grammaire…)  joue alors un  rôle  important mais les  éléments théologiques sont loin d’être absents ; ils sont examinés à partir des démarches propres de l’exégèse  (questio,  sed  contra, interprétations avec lesquelles  Thomas est en désaccord…). Mais il semble bien que Thomas soit encore plus intéressé par la dimension éthique des passages des épîtres. Toutes ces données sont examinées dans la tradition d’exégèse des lettres pauliniennes, particulièrement des commentateurs dominicains du xiiie siècle (Hugues de Saint-Cher, Pierre de Tarentaise, Nicolas de Gorran).

Extrait

Après avoir lu l’ensemble des textes de Thomas sur les passages des épîtres pauliniennes touchant à l’eschatologie, je me suis posé un problème de méthode, me demandant comment il fallait présenter cette matière à la fois riche et apparemment décevante — décevante si l’on voulait reconstituer à partir des commentaires de saint Paul une eschatologie thomasienne. Certes, il aurait été possible, en s’inspirant par exemple de la Somme de théologie, de faire entrer dans un cadre prédéterminé les différents éléments fournis par les commentaires  : les signes qui précèdent le Jugement dernier, la résurrection des morts, le Jugement général, l’état du monde après le Jugement et, si l’on veut, la vision de l’essence divine — on aura reconnu les questions 73 à 92 du Supplementum. J’avais commencé par classer mes fiches en suivant ce beau plan ; mais cela m’a laissé totalement insatisfait et cela ne me paraît pas être de bonne méthode : un commentaire scripturaire n’est pas un traité de théologie, même si l’on peut y trouver nombre de réflexions théologiques. La démarche inverse, plus neutre et plus docile, aurait été de suivre les commentaires dans leur déroulement même : autre insatisfaction ici, on aurait abouti à une paraphrase brouillonne, laissant à l’auditeur le soin de recomposer lui-même les grandes lignes d’une pensée. La meilleure solution m’a semblé de partir de ce qui fait l’essence même du commentaire, de la méthode exégétique de saint Thomas. J’ai eu plusieurs fois l’occasion d’analyser l’exégèse thomasienne des épîtres de  saint  Paul. À chaque fois me sont apparues dans la plus grande clarté les qualités de cette exégèse : rigueur, attention constante portée au texte, souci de pédagogie, mise en valeur des éléments théologiques portés par le texte.