Foi implicite et religions non chrétiennes

Benoît-Dominique de La Soujeole o.p.
5,00 € l'unité
2006 - Fascicule n° 1 et 2 - Saint Thomas et la théologie des religions 2006 - Tome CVI
315 - 334
Article
non chretien, foi mplicite, Religion

Résumé

La foi implicite et la foi explicite concernent l’acte intérieur de foi. Il s’agit de deux modes selon lesquels l’objet de la foi (la Vérité révélée) est dans l’acte de l’intelligence qui le saisit (credere Deum). La relation entre implicite et explicite est une relation de puissance à acte qu’il faut bien distinguer de la relation voisine qui concerne le développement dogmatique. Cela permet de distinguer la foi simplement potentielle (ou possible) de la foi virtuelle et de la foi actuelle. La situation des religions non chrétiennes au regard de l’acte de foi théologale possible ou virtuel de leurs membres doit être appréciée tant au regard du credere Deo que du credere Deum qu’elles peuvent permettre. Enfin, il convient de voir l’importance de l’acte extérieur de la foi, la confession, pour pouvoir évaluer dans quelle mesure le milieu non chrétien peut le favoriser malgré ses limites.

Extrait

En linguistique, d’une façon générale, on dit qu’une proposition est implicite lorsqu’elle est sous-entendue dans une autre proposition qui, elle, est explicite. Par exemple, si nous disons explicitement que Paul est à l’hôpital, du même coup nous affirmons implicitement qu’il sera absent à notre réunion. Les deux notions sont par conséquent strictement relatives, de sorte que, la proposition explicite étant posée, il s’ensuit nécessairement que l’implicite est également présente.
En théologie moderne, les notions d’explicite et d’implicite ont été surtout sollicitées à propos de la justification du développement dogmatique. Il s’agissait de rendre compte de son homogénéité avec sa source qu’est la Révélation. La distinction classique mise en oeuvre était entre le raisonnement véritable (illatif quoad se) qui conduit à une vérité nouvelle distincte des prémisses, et le raisonnement seulement explicatif (illatif quoad nos) qui ne va pas au-delà de l’identité conceptuelle entre diverses formulations : il s’agit ici de progresser dans la même vérité. Le développement dogmatique s’appuie sur ce second type de raisonnement qui seul permet de rendre compte de l’identité de la vérité exprimée par les prémisses (la Révélation) et de la vérité exprimée par la conclusion (la définition dogmatique). La proclamation de l’Immaculée Conception en 1854 n’a pas augmenté la Révélation : la vérité qui, un jour, est formulée par l’Église était déjà présente, mais a été mieux manifestée, explicitée donc. La règle du développement dogmatique est, selon la formule de saint Vincent de Lérins, dans le non nova, sed nove. Ce « désenveloppement » explicite, c’est-à-dire exprime, d’une façon nouvelle et plus précise ce qui est déjà contenu dans le dépôt de la foi de façon plus embryonnaire, c’est-à-dire implicitement.