Le commentaire du Livre Z de la Métaphysique par Thomas d’Aquin sert de fil conducteur à une reconsidération de son rôle dans la substance sensible. Le rapport matière/forme permet de conjuguer identité spécifique et multiplicité individuelle dans les substances sensibles. Composant avec la forme substantielle l’essence des substances sensibles, la matière peut être dite par cette relation. La quantité dimensive et la divisibilité qu’elle permet peuvent ainsi la qualifier comme sujet premier de la forme des substances corporelles sans rendre impossible le devenir absolu.
b) Espèce : forme et matièreMais dire que l’essence des réalités sensibles inclut dans sa compréhension l’ordre matériel principe des accidents sensibles spécifiques change-t-il vraiment la perspective ? Ce déplacement apparemment minime entre la species « homme » et la forma partis « humanité » permet-il de rendre compte différemment du rapport entre l’espèce et les individus ?Le singulier étant autre chose et différent de l’espèce elle-même, il y a un ajout dont il faut rendre compte. La difficulté étant de justifier la « venue à l’être » de cette différence sans rompre l’unité d’une communauté de nature. Une autre interprétation proche de la précédente a aussi été donnée : la composition de l’espèce avec la materia signata identifiée aux accidents individuels. L’ambiguïté a pu être entretenue par nombre d’expressions. Mais on ne comprend toujours pas comment une telle composition pourrait justifier d’une distinction substantielle entre les individus. L’unité intelligible de l’espèce est maintenue, mais la réalité propre de l’individu continue d’être inexistante : la singularité n’est pas celle de la substance, mais d’un ensemble d’accidents ajouté à l’espèce. Il n’y a pas, de fait, de principe de l’individualité de la substance. La matière n’est ici encore qu’une condition d’existence singulière. Critiquer une telle conception et en appeler à la forme/acte pour justifier de la singularité de la substance est alors compréhensible.