Thématique contemporaine, le pardon des offenses n’a pas de présentation synthétique dans l’œuvre de saint Thomas. De façon brève, l’Aquinate l’évoque toutefois au sein des œuvres de miséricorde dans son traité de la charité de la Somme de théologie. En s’appuyant sur ce point de départ formel, la présente étude se propose d’explorer la notion de pardon à partir des principes thomasiens : les concepts de « misère » et de « rémission » s’avèrent riches de conséquences et méritent d’être remis en valeur pour mieux répondre à la cinquième demande du Notre Père.
Depuis plusieurs années, le magistère pontifical a invité l’Église à réfléchir sur le pardon des offenses. Dans son encyclique Dives in misericordia, saint Jean-Paul II affirmait : « Le monde des hommes pourra devenir “toujours plus humain” seulement lorsque nous introduirons, dans tous les rapports réciproques qui modèlent son visage moral, le moment du pardon, si essentiel pour l’Évangile. » À sa suite, le pape François écrivit à l’occasion de l’Année de la miséricorde : « Le pardon des offenses devient l’expression la plus manifeste de l’amour miséricordieux. » Et il reprit le thème dans son encyclique Fratelli tutti.
Or, si beaucoup d’études philosophiques et théologiques ont été proposées sur le pardon depuis le pontificat de saint Jean-Paul II, leur référence à saint Thomas d’Aquin est quasiment inexistante. En première analyse, ceci est assez compréhensible. Car, chez l’Aquinate, le pardon des offenses s’insère dans le traité de la charité à la IIa-IIae de la Somme de théologie. Et il ne s’agit que d’une simple allusion au sein des œuvres de miséricorde, en réponse à l’interrogation : « A-t-on distingué de façon convenable les divers genres d’aumônes ? » de l’article 2 de la question 32. Force est de constater qu’il n’y a pas d’étude synthétique du pardon dans la Somme de théologie.