Programme de l’ISTA 2021 - 2022

S1 : du 11 au 15 octobre 2021

  • Fr. François Daguet : Éléments de politique thomasienne

La session présente quelques éléments centraux des analyses politiques de saint Thomas d’Aquin, référés spécialement à ce qui finalise, pour lui, la vie de la communauté politique, qu’il appelle le bien commun. La justice générale, la prudence politique, la loi de la cité permettent de faire de celle-ci une véritable communauté ordonnée au bien de tous ensemble et de chacun en particulier, autrement dit une authentique communauté humaine.

A travers ces quelques lieux, il s’agit de montrer que Thomas d’Aquin a élaboré une théologie du politique, largement méconnue, qui est en fait à l’origine du renouveau de la pensée politique au Moyen Âge, et qui annonce les futurs développements de l’époque moderne. On se référera principalement à l’ouvrage Du politique chez Thomas d’Aquin, Paris, Vrin, 2017.

  • Fr. Thierry-Dominique Humbrecht : Les méthodes en métaphysique

Faire de la métaphysique avec Thomas, c’est entrer dans une jungle dont on n’est pas sûr de sortir. Malgré les apparences trop lisses de quelques déclarations de méthode, vraies de son point de vue mais partielles quant à sa pratique, le contenu autant que la méthode en métaphysique demeurent problématiques. Tout cela conditionne le statut de la philosophie mais aussi le rapport de celle-ci à la doctrine sacrée. Qu’a donc voulu faire Thomas, entre la métaphysique intégrée en théologie des Augustiniens et la métaphysique séparée des Artiens de Paris, sans compter nombre de reprises contemporaines, qui entendent imprudemment reconstruire la métaphysique de Thomas ?

 

S2 : du 29 novembre au 3 décembre 2021

  • Fr. Emmanuel Perrier : La définition du péché selon saint Thomas d’Aquin

La réflexion de saint Thomas d’Aquin sur le péché est originale en ce que le théologien n’a cessé -de scruter ses fondements. La définition proposée par saint Augustin dans le Contra Faustum 22, 27 servait de point de départ commun aux moralistes, l’Aquinate voulut la comprendre à partir d'un cadre plus large. Qu’est-ce qu’un péché du point de vue de l’ordre de l'univers établi par Dieu, et plus précisément compte tenu de la place que l’homme doit y tenir ? Quelle spécificité le péché retire-t-il du mode propre à l’homme d’agir ? Quelle est la particularité du mal qu’il introduit dans le monde lorsqu’il pèche ? Il apparaît alors que « l'acte humain mauvais » est un mal de l’opération, privant l'homme de la perfection d’atteindre sa fin, parce qu’il manque consciemment à la règle ou à la mesure instaurée par la loi divine.

  • Fr. Philippe-Marie Margelidon : Religion, culte et dévotion selon Thomas d’Aquin

La religion est un phénomène culturel et social, ce que les sciences humaines étudient depuis plus d'un siècle. Elle est aussi et d'abord un comportement moral, ce qu'on appelle une vertu éthique. Il s'agit ici d'étudier sa structure, ses actes ses formes, sa fin,   et ses rapports avec ce que les théologiens appellent le culte et la vie théologale. Cette vertu humaine est à l’intersection du social et du moral, de  la théologie et de la philosophie, du naturel et du surnaturel, elle coordonne et articule deux types d'attitudes humaines à l'égard du divin : le sacré et le saint. Puisque la religion est la vertu du culte divin par excellence, il est essentiel de repérer et d'analyser ses actes principaux, extérieur et intérieur, à savoir la devotio et l'adoratio

 

S3 : du 31 janvier au 4 février 2022 

  • Fr. Serge-Thomas Bonino : Saint Thomas contre Pélage

L’étude de la description et de la réfutation de l’hérésie pélagienne par saint Thomas d’Aquin  confirme la thèse, désormais classique, d’une évolution de la doctrine thomasienne de la grâce dans le sens d’un antipélagianisme toujours plus marqué.  Cette évolution est due en partie à la découverte de la controverse « semi-pélagienne » qui conduit saint Thomas à écarter toute idée d’une part réservée exclusivement à l’homme dans l’œuvre de son salut (initium fidei) et à affirmer la nécessité de la grâce pour persévérer dans le bien. Elle est aussi inséparable de l'approfondissement de la réflexion métaphysique sur l’articulation non-concurrentielle entre la causalité divine et la causalité créée, spécialement sur l'action divine à l'intérieur même de la volonté libre de la créature, comme le manifeste l'étude de l'usage thomasien de Ph 2, 13.

  • Abbé David Biziou : La relation des deux cités : du pouvoir indirect de saint Robert Bellarmin jusqu’à Joseph Ratzinger.

La doctrine du pouvoir indirect, inscrite dans un contexte de chrétienté, a exercé son influence jusqu’au XXe siècle. Après le « moment » Maritain de la proposition d’une chrétienté profane, Joseph Ratzinger s’est attaché à penser l’agir de l’Église dans un monde marqué par le relativisme religieux et éthique. La session s’attachera à montrer que, au-delà des contingences de l’histoire, l’Église cherche toujours à garantir la liberté de l’acte de foi c’est-à-dire l’accès de l’homme à Dieu.

 

S4 : du 28 mars au 1er avril 2022

  • Fr. Sylvain Detoc : Des Pères anténicéens à saint Thomas : des continuités inattendues

Patristique et scolastique ? « Embrasser l’une, c'est rejeter l'autre », lit-on dans une étude récente qui dénonce cette « dialectique tragique » et montre au contraire des éléments de continuité entre les Pères grecs et saint Thomas. Une telle porosité est envisageable à propos des Pères les plus spéculatifs cités par le Docteur commun. Nous nous demanderons dans quelle mesure elle peut s'étendre aux Pères anténicéens.

  • Fr. Eric Pohlé : Saint Thomas lecteur de saint Augustin. Principes et exemple du Christ maître et médecin

Vt enim egregius doctor Augustinus ait… (« Comme dit l’éminent docteur Augustin… », saint Thomas d’Aquin, In I sententiarum, dist. 1, divisio textus). Lorsqu’on lit saint Thomas d’Aquin, il est nécessaire d’accorder une place unique, parmi toutes les sources de la Tradition, à l’œuvre de saint Augustin. Non seulement à cause de la place de l’Hipponate dans les Sentences de Pierre Lombard, mais encore à cause de la liturgie et plus spécifiquement à cause de l’Ordre religieux auquel appartient frère Thomas, la présence du Père africain mérite d’être étudiée non seulement en tant que matière disponible ou réfutable pour une nouvelle théologie mais en tant que source d’une théologie vraiment nouvelle parce qu’entretenant un dialogue vivant avec les auteurs du passé qui sont les saints du présent. C’est cette relation entre Thomas et Augustin que nous chercherons ici à mieux connaître. Après l’exposé des principes et de l’histoire de cette question disputée (4 h), nous ouvrirons grâce aux textes deux dossiers significatifs : celui du Christ maître (3 h) et celui du Christ médecin (3 h).    

 

S5 : du 30 mai au 3 juin 2022

  • Fr. Thierry-Marie Hamonic : Les sens internes chez saint Thomas d’Aquin

Les sens internes ont pour objet les actes des sens externes à partir desquels ils élaborent des re-présentations : les phantasmes. Dans l’anthropologie de Saint Thomas, le rôle des sens internes et de leurs phantasmes respectifs est considérable : le sensus communi rend les perceptions sensibles conscientes, l’imagination les conserve et peut les reproduire ou les combiner entre elles, la mémoire sensible – entre autre chose – dispose de l’étonnant pouvoir de rendre présentes les perceptions du passé en tant que passées. 

Mais le sens interne le plus mystérieux et le plus fascinant est la cogitative. Les activités que saint Thomas lui attribue sont multiples et complexes : elle joue un rôle décisif dans le processus de l’abstraction, elle est au principe de des mouvements passionnels des appétits sensibles, et elle s’avère indispensable dans la formation de tout jugement pratique… Or, pour saint Thomas la cogitative, à l’instar de toutes les puissances sensibles, est une faculté organique. À la suite d’Avicenne, il  lui assigne un siège dans une région du cerveau. Ceci nous conduira à réfléchir sur l’éclairage que les neurosciences peuvent apporter sur son mode de fonctionnement, et plus généralement sur l’enracinement neurophysiologique du psychisme humain.

  • Fr. Henry Donneaud : Questions disputées sur le sacrement de l'ordre

Dans le souci de mieux dégager la vérité du sacrement de l’ordre à travers les vicissitudes de sa théologie en deux mille ans d'histoire de l’Église, la session s'attachera à suivre de façon diachronique quelques-unes de ses arrêtes problématiques : la sacerdotalisation du presbytérat au cours de l'époque patristique ; l’évacuation de l'épiscopat hors du sacrement de l’ordre dans le haut Moyen Âge ; les sept degrés de l'ordre définis par rapport à l’Eucharistie dans la scolastique médiévale puis au Concile de Trente ; le retour aux trois degrés et la définition de l’ordre par rapport à l’épiscopat à Vatican II.