Enjeu et portée du commentaire sur le traité des lois de Thomas d'Aquin par Francisco de Vitoria

Gaelle Demelemestre
5,00 € l'unité
2014 - Fascicule n°3 2014 - Tome CXIV
417 - 454
Article
Thomas d'Aquin, Loi, Francisco Vitoria

Enjeu et portée du commentaire sur le traité des lois de Thomas d'Aquin par Francisco de Vitoria

Article écrit en l'année 2014 par G. Demelemestre dans la Revue thomiste n° CXIV, pages 417-454.

Résumé

Le présent article reprend les termes d'un débat très vif, au XVIe siècle, sur la nature et la fonction de la loi. Il s'est engagé à la faveur d'une omniprésence quasi systématique, et de plus en plus récurrente, de la référence à la volonté lorsque l'acte législatif était défini. le geste souverain, essentiellement décisionnaire, voilait cependant un autre sens de la loi, qui avait été progressivement occulté, à savoir sa capacité à ordonner le réel. Après un rappel des différentes inflexions survenues dans la définition de la loi après sa formalisation par Thomas d'Aquin comme pouvoir d'ordonnancement et force contraignante, on se propose d'expliciter les enjeux soulevés par ce débat. On utilisera pour ce faire un texte majeur de Francisco Vitoria, le De lege, qui permet de rendre très précisément compte des différents arguments avancés de part et d'autre pour défendre le volontarisme souverain ou accorder plus d'importance au pouvoir créateur de la loi.

Extrait

La modernité s’ouvre avec une profonde transformation des différents outils conceptuels utilisés jusqu’alors pour traduire le rapport de l’homme à ses semblables et au monde qui l’entoure. La notion de loi fait partie des notions qui allaient subir une grande inflexion. Dans la lignée de l’esprit thomasien, la loi avait pour fonction essentielle de restaurer entre les choses les rapports que la contingence du réel leur avait fait perdre. Elle avait certes aussi la fonction de sanctionner, mais sa vertu première était d’ordonner les parties de la société humaine. Le courant nominaliste avait très tôt questionné la capacité de la loi à renvoyer à une signification plus fondamentale du réel que ce que pourrait en comprendre l’homme. En faisant primer la volonté sur l’intellect pour traduire l’essence de la loi, il la faisait progresser vers le sens que la modernité lui retiendra, à savoir d’être le signe d’une volonté qui s’impose parce que voulue comme telle par celui qui détient le pouvoir de légiférer.