Comment lire les grands maîtres ? Gérard de Monte, Heymeric de Campo et la question de l’accord entre Albert le Grand et Thomas d’Aquin (1456)..

Maarten J. F. M. Hoenen
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2008 - Fascicule n°1 - Antithomisme I pensée médiévale
1800
105 - 130
Article

Sous titre

Gérard de Monte, Heymeric de Campo et la question de l’accord entre Albert le Grand et Thomas d’Aquin (1456)

Résumé

Cet article examine la réception des oeuvres de Thomas d’Aquin pendant le Moyen Âge tardif, en se centrant sur l’exemple du thomiste Gérard de Monte, lequel a critiqué l’albertiste Heymeric de Campo pour avoir fait une différence entre les enseignements de Thomas d’Aquin et ceux d’Albert le Grand. Selon Gérard en effet, il faut lire les deux dominicains dans une perspective théologique, approche vivement rejetée par Heymeric, selon qui commenter Aristote est une entreprise proprement philosophique, même s’il doit en résulter un conflit avec la foi. Ce débat a joué un rôle important au xve siècle, mettant en lumière la tendance croissante des thomistes à insister sur l’harmonie entre foi et raison ainsi que la réaction critique subséquente des albertistes.

Extrait

Nolite plures magistri fieri fratres (frères, évitez qu’il y ait plus d’un maître) ! Tels sont les mots de l’Épître de saint Jacques que le thomiste Gérard de Monte place en exergue de sa réponse au Tractatus problematicus de l’albertiste Heymeric de Campo. Il s’agit d’une réaction plutôt tardive. Gérard écrit son traité en 1456, soit plus de trente ans après la publication du Tractatus problematicus d’Heymeric. Cela étant, Gérard ne laisse aucun doute quant aux raisons motivant sa réponse. Selon lui en effet, dans le Tractatus problematicus, Heymeric défend la thèse selon laquelle les enseignements de Thomas d’Aquin et Albert le Grand sont opposés sur de nombreux points, et ce malgré le fait que tous les deux étaient des théologiens et appartenaient au même ordre religieux. Par sa réponse, Gérard veut rectifier cette vision erronée des choses, en démontrant que les deux dominicains ont défendu des idées semblables ; il dévoile d’emblée son objectif en qualifiant son traité de concordantia, un terme qui a conduit les imprimeurs médiévaux de Cologne à le publier sous le titre de Concordantiae dictorum Thomae Aquinatis et Alberti Magni ou celui de Tractatus ostendens concordiam Thomae Aquinatis et Alberti Magni.