Bulletin de théologie et des sciences (II) : Oser parler de l'âme

Jean-Michel Maldamé, o.p.
5,00 € l'unité
2017 - Fascicule n°4
2017
659 - 682
Bulletin
Science, Anthropologie

Sous titre

Oser parler de l'âme

Résumé

Ce bulletin « Théologie et sciences (II) » prolonge l’analyse des fondements des travaux publiés dans les neurosciences. Elle en dit les sources métaphysiques et montre que la notion d’anima présentée par saint Thomas d’Aquin permet d’assumer les résultats scientifiques dans une anthropologie ouverte sur la Révélation.

Extrait

Les neurosciences sont devenues un paradigme pour les sciences humaines, comme l’atteste le fait que « neuro » est utilisé comme préfixe de diverses disciplines avec l’intention de leur donner un label de qualité.En matière de pédagogie, la perspective classique issue des travaux de Piaget sur la formation de l’intelligence et fondatrice de la pédagogie a été enrichie de l’apport des neurosciences. On parle donc de « neuro-pédagogie cognitive ». Le fondement est que la mémoire et l’apprentissage passent par le cerveau. Il est clair en effet que certains troubles d’apprentissage (comme la dyslexie ou le déficit d’attention) ont des bases neuronales. La «  neuro-pédagogie » est utilisée pour fonder une « science de l’éducation » ; de même en psychologie. Il existe aussi une « neuro-psychanalyse ». Le terme désigne un courant de la psychanalyse nord-américaine (fort différente de la psychanalyse en France) qui s’est enraciné dans l’étude des émotions pour accéder à l’« inconscient ». Cette école s’enracine dans les travaux parisiens du jeune docteur Sigmund Freud étudiant les mécanismes neuronaux avant de s’attacher à traiter des maladies de l’âme (psychè en grec, Selle en allemand) par des moyens différents de la pratique médicale habituelle. Des écoles de psychanalyse se sont fondées avec le souci d’assumer les résultats des neurosciences. Pour l’action humaine, il y a également une « neuro-éthique », qui répond à trois champs. D’abord, étudier les bases neurologiques de l’éthique en répondant aux questions comme : quelle est la base cérébrale spécifique des « comportements moraux » (empathie, altruisme…) ; ensuite, explorer les conséquences des neurosciences : usage des médicaments non seulement pour traiter des états dépressifs mais comme amélioration des performances ou pour provoquer des types d’émotions ; et enfin, étudier les manipulations des foules ou des groupes. Dans ce cadre, il existe aussi une « neuro-économie » ; elle consiste à mettre au service du marché les ressources des neurosciences pour l’étude des motivations, des prises de décision ou de mise en pratique des choix dans le champ de l’économie. Les neurosciences sont utilisées à la fois pour connaître les effets émotionnels et les rationalités impliqués dans les comportements de la consommation. Il existe enfin une « neuro-théologie ». Celle-ci se fonde sur l’observation du cerveau des personnes en train de pratiquer la méditation dans un contexte religieux (moine bouddhiste ou religieuse contemplative) et d’observer l’activité  cérébrale avec même l’ambition de saisir les phénomènes comme l’extase mystique. L’utilisation des résultats a été immédiatement apologétique et reprise par les mouvements charismatiques : il existe une zone spécifique liée à la prière, ce qui signifie deux choses : l’être humain est naturellement religieux et son bien-être suppose une pratique religieuse source d’un bon équilibre moral et mental.