Autour du De potentia, q. 3, a. 5 : Aspects de l'interprétation de F. Van Steenberghen

Robert Wielockx
5,00 € l'unité
2017 - Fascicule n°3
2017
479 - 486
Etude
De potentia, métaphysique

Sous titre

Aspects de l'interprétation de F. Van Steenberghen

Résumé

L’interprétation du De  potentia,  q. 3,  a. 5, proposée par F. Van Steenberghen se heurte à des difficultés. Elle  s’appuie  systématiquement  sur  des ajouts absents des données textuelles de Thomas. Elle implique aussi de l’intrépidité, car, après avoir noté que « l’aliquid unum qui existe en plusieurs ne doit pas être compris comme perfection préexistante qui serait participée par divers sujets », l’interprète en appelle déjà comme à une chose vue : « On le voit, dans cette première démonstration, saint Thomas exprime en termes heureux la preuve métaphysique de l’existence de l’Être infini fondée sur la similitude ontologique des êtres finis.  » L’interprète s’engage d’ailleurs à vouloir expliquer un silence dans q. 3, a. 5. Inutile, cette explication est, de plus, erronée. Ce n’est nulle part, ni dans l’a. 5 ni dans l’a. 6, que Thomas attribue à l’opposition entre deux êtres finis la causalité exercée par l’un d’eux sur l’autre. Au contraire, il y affirme expressément (a.  6) que cette causalité a comme effet propre ce qui appartient en commun aux deux. Enfin, à la comparaison avec É. Boutroux, F. Van Steenberghen, d’une part, à la différence de Thomas durcit l’opposition entre « nécessaire » et « fini » et, d’autre part, est plus lent à expliquer la « Cause » transcendante comme « Liberté ».

Extrait

Se limitant à attirer l’attention sur quelques aspects de l’interprétation que Fernand Van Steenberghen a proposée du De potentia, q. 3, a. 5, cette contribution n’entend pas épuiser tout ce que renferme cette interprétation. Elle ne prétend d’ailleurs pas présenter une étude systématique et complète du texte mentionné de Thomas d’Aquin.
1. Dépassements des textes thomasiens
On note une certaine ambivalence dans les textes que F. Van Steenberghen a consacrés au De potentia, q. 3, a. 5. D’une part, il n’a pas ménagé ses louanges à l’adresse de ce passage : celui-ci constituerait une preuve, d’ailleurs unique et sans réplique, de l’existence de l’Infini, cause de l’ordre des êtres finis. D’autre part, il n’a pas manqué de marquer nettement la part d’interprétation personnelle qu’il mêle au texte authentique de Thomas pour «  ramener » ce texte au statut de preuve « sans réplique ». Un passage de la conclusion de son livre en dit long. Dans la citation que l’on en trouve ci-dessous, les cursives sont celles de F. Van Steenberghen, les mots soulignés, sauf leur soulignage, sont les siens aussi. Les cursives comme les soulignages signalent le manque d’équivalent en Thomas.